JazzOnze+ 2025 | Gonzalo Rubalcaba & Hamilton de Holanda : rencontre entre génies.

Hamilton de Holanda e Gonzalo Rubalcaba Dani Gurgel

C’est une rencontre au sommet que le JazzOnze+ Festival de Lausanne a offert ce mercredi 29 octobre : celle du pianiste cubain Gonzalo Rubalcaba et du mandoliniste brésilien Hamilton de Holanda, réunis autour de leur album Collab (2024), nommé aux Grammy Awards. Entre virtuosité et émotion pure, les deux maîtres ont offert un dialogue musical d’une rare intensité, et La Fabrik vous propose deux entretiens exclusifs : en anglais avec Rubalcaba, et en français avec de Holanda.

1. Rencontre avec Hamilton de Holanda (en français)

Le concert débute avec un léger retard, dans une atmosphère feutrée. L’élégance est là, sans artifice: veste sobre pour Rubalcaba, lunettes épaisses et blanches qui attirent la lumière ; assurance tranquille pour de Holanda, mandoline en main, déjà habité par la musique. Le duo s’ouvre sur Incompatibilidade de Gênios de João Bosco, clin d’œil ironique à leur propre entente musicale, avant de se lancer dans Mandalagh, une composition vertigineuse de Hamilton. Rubalcaba sourit et confie au public n’avoir “jamais autant souffert” qu’à jouer cette pièce: une manière d’avouer que le Brésilien aime se compliquer la vie… pour atteindre la perfection.

2. Rencontre avec Gonzalo Rubalcaba (in English)

Puis vient un moment suspendu : Yolanda Anas, berceuse écrite il y a vingt-neuf ans pour la fille de Rubalcaba, nous plonge dans une douceur presque cinématographique. La salle retient son souffle. Le pianiste cubain, héritier d’une lignée musicale prestigieuse – son père Guillermo était chef d’orchestre et son grand-père compositeur –, déploie ici toute sa sensibilité. La pièce suivante, Blues Lundvall, rend hommage à Bruce Lundvall, l’emblématique patron du label Blue Note, avant que Hamilton ne reprenne seul le flambeau avec Flor de Vida.

Le sommet émotionnel du concert arrive avec First Song de Charlie Haden, dédiée par Rubalcaba à Jack DeJohnette, batteur légendaire disparu quelques jours plus tôt. Le pianiste joue dans un état de grâce mélancolique, comme en dialogue avec les fantômes de son passé. On le sent ailleurs, sur une autre scène, dans un autre temps. Cette pièce devient une prière, une transmission, une manière d’honorer les générations de musiciens qui ont fait le jazz.

Le duo se reforme ensuite pour une fin plus lumineuse. Flying Chicken, vif et jubilatoire, relance le rythme, avant une version explosive de Caravan, entre samba et salsa, où virtuosité et complicité se rejoignent enfin dans une joie communicative. En rappel, Bésame Mucho, interprété avec humour et tendresse, clôt la soirée sur une note d’universalité. “Certains le jouent bien, d’autres beaucoup moins”, plaisante Rubalcaba. Eux, sans aucun doute, sont du bon côté de l’histoire.

Deux musiciens au sommet de leur art, unis par la rigueur, la générosité et la mémoire d’un jazz sans frontières. À travers Collab, Rubalcaba et de Holanda réaffirment que la musique n’est pas une compétition de virtuosité, mais une conversation intime entre âmes, et ce soir, le public lausannois a eu le privilège d’en être témoin.

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