Black Movie 2016: Right Now, Wrong Then

Un escalier étroit, une file d’attente assez dense, des fauteuils bleus délavés et des murs polychromes. C’est le Cinelux, un soir de Black Movie.

Les gens papotent à mi-voix. Ça crée un brouhaha cotonneux. Un bruissement de bonjours, de « bonne année » (on peut encore, jusqu’à fin janvier), d’attentes, de questionnements. A quoi s’attendre ce soir ? Ken Black cligne de l’œil sur l’écran, sa boisson gazotante à la main. Il paraît que le café est très bon au Black Movie, et qu’il vaut mieux boire du café que cette boisson 80% hallucinogène, 72% aphrodisiaque, 68% amphétamine. Mais ce soir, nous sommes tentés par les nouvelles expériences. Nos yeux boiront du 99% addictif : Right Now, Wrong Then de Hong Sang-Soo.

Ce film de Hong Sang-Soo s’adresse apparemment à trois publics différents, et c’est le Black Movie qui le dit :
– Ceux qui ont déjà vu Hong Sang-Soo, qui aiment Hong Sang-Soo et qui auront du plaisir à voir un film qui est totalement dans la lignée des films de Hong Sang-Soo.
– Ceux qui n’ont jamais vu du Hong Sang-Soo, et qui apprécieront de découvrir son univers et son écriture scénaristique.
– Ceux qui ont déjà vu un film de Hong Sang-Soo, qui ont bien compris que Hong Sang-Soo fait des films à la Hong Sang-Soo, avec une signature particulière, un rythme et une manière de diriger des acteurs, et qui seront d’accord de le suivre pour une réflexion sur le cinéma, sur son œuvre et sur son travail de réalisateur.

Prometteur… Extinctions des feux, allumage du projecteur, action !

Ham, réalisateur, rencontre une jeune peintre, ex-mannequin. Il lui fait du charme, lui dit tout ce qu’elle a envie d’entendre pour lui plaire, arrive à ses fins. Ivre (oui, il y a souvent pas mal d’alcool chez Hong Sang-Soo), il se fait démasquer par les amies de la jeune-fille qui décide de ne plus le revoir. Il fait tout juste, mais il est faux. C’est Right then, wrong now…

Car ce n’est que la première partie du film. On prend les mêmes et on recommence. Avec une autre manière d’être, un franc-parler, un sans-gêne. Cette fois, Ham est plus vrai, plus drôle aussi, et ça marche. Right now, wrong then.

A ces détracteurs qui lui reprochent de faire toujours les mêmes films, Hong Sang-Soo réplique avec ce diptyque, deux films identiques dans un seul métrage, et joue sur les nuances. Il démontre ainsi qu’avec un même film, on peut arriver à des scènes et des tonalités différentes, seulement en modifiant quelques éléments, de caractère, de textes. Les péripéties sont les mêmes, c’est la manière de les traiter et les conclusions qui changent.

Les lumières se rallument, on a un peu mal aux fesses – soyons honnêtes les fauteuils du Cinelux ne sont pas des plus confortables, mais on est content, très content même, d’être passé par là, d’être entré dans ce petit cinéma de quartier plein de cachet, et d’y avoir pris une leçon d’amour naissant, simple, sensible, tout en nuances. Il ne reste plus qu’à faire comme Ham, et s’en aller…

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