D’abord bien connu pour ces concerts et ces soirées clubbing, Antigel est avant tout un festival de performances artistiques pluridisciplinaire. Et pour le prouver, plusieurs artistes se sont associés pour offrir au public une balade surprenante dans les allées de l’usine ABB à Meyrin-Satigny. Notre reporter s’est également prêtée au jeu et vous décrit la visite comme si vous y étiez ! Suivez le guide…
Après une arrivée quelque peu mouvementée, me voilà dans la gigantesque usine ABB. C’est grand, c’est métalique, c’est lumineux. Une usine, quoi. Mais aujourd’hui, l’usine ABB est le théâtre de performances plus suprenantes les unes que les autres. On commence par une démonstration de batterie quelque peu étrange au premier abord. Le batteur, Bernard Trontin, se tient près de l’entrée avec son matériel, sur une scène aménagée spécialement pour lui. Pas de fioritures ou de décor étrange pour introduire le spectacle qui va se dérouler sous nos yeux. Simplement l’artiste, debout, seul et concentré. Alors qu’il commence à jouer, petit à petit une mélodie se fait entendre. Elle ne semble pas servir de repère au muscien mais plutôt d’accompagnement. Car ici, c’est la batterie qui a le rôle principal et Bernard Trontin nous démontre brillament que cet instrument a sa propre musicalité.
Etape suivante. Après une petit balade dans l’usine pendant laquelle il n’est pas inintéressant d’observer ce qui nous entoure, nous voilà dans une pièce aménagée spécialement pour la performance suivante. Le ton est donné très rapidement : l’éclairage très sombre et la fumée qui entoure la scène nous invite dans un univers qui s’annonce très énigmatique. Mais le plus surprenant reste les trois mannequins au visage caché qui trônent au centre de la scène, qui commencent alors à bouger sur la musique hypnotisante de Julien Tarride. On cherche les fils et les mécanismes éventuels, avant de réaliser qu’il s’agit en fait de trois danseuses, tout ce qu’il y a de plus vivant. Elles se contorsionnent, sans vraiment se déplacer, sur une chorégraphie d’Aurélien Dougé et laissent les spectateurs complètement bouche bée devant leur prestation à la fois étrange et envoûtante.
Quand la musique prend fin, on se réveille et la balade continue. La prochaine performance est annoncée d’emblée : claquettes par Daniel Leveillé. Pas de trace du jeune homme en revanche. Puis, une porte coulisse sur le côté et le danseur fait son entrée sur une plateforme poussée par un collaborateur. Commence alors une prestation andiablée : Daniel Leveillé nous prouve, là encore, que la musique n’est pas nécessaire et qu’elle n’est qu’un accompagnement. On touche le cœur du spectacle quand s’élève des hauts parleurs une voix que je soupçonne appartenir au danseur. Là, il explique les claquettes, cette discipline qui relève autant de la danse que de la musique, donnant au spectateur l’occasion de perfectionner sa culture générale. Le tout, évidemment en continuant à danser et en illustrant en direct ses commentaires et ses exemples. Une jolie paire de claques à ceux qui pensent que les claquettes sont mortes avec Fred Astaire !
La visite continue et cette fois le spectateur est amené à levé les yeux. Sur un balcon en hauteur, on voit un lutrin sur lequel sont posées des partitions. Puis apparaissent deux jeunes femmes, une violoniste et une chanteuse qui entament un morceau féérique qui résonne dans l’usine. Autant dire que le décalage est saisissant !
Mais ce n’est pas fini ! Avant de laisser le public retourner au froid, Louise Hanmer offre une chorégraphie plus que déroutante interprétée par un couple de danseurs. L’homme porte sa partenaire et la dépose délicatement sur la scène alors que deux joueurs de cornemuse en costumes traditionnels écossais les accompagnent. Ils commencent à jouer et les danseurs bougent sur la musique : tout d’abord ils exécutent des mouvements qui ressemblent à des échauffements, puis ils se déplacent sur la scène, de plus en plus rapidement, accomplissent des enchainements de plus en plus compliqués et rapides. Le spectateur assiste donc à une performance décalée et déroutante mais très stimulante !
Finalement, Antigel tient ses promesses en invitant le public à cette promenade surprenante en tout point et qui lui permet d’entrer en contact avec des disciplines qu’on a trop tendance à laisser de côté. Evidemment, les performances peuvent parfois paraître étranges, mais elles ne laissent jamais indifférentes et le public sort de là électrisé !
– Joana Lopes