Charlie Winston : “Je ne pense pas qu’un artiste trouve sa propre place un jour” (Partie 1)

C’est sans chapeau mais avec toute l’élégance britannique qui le caractérise que Charlie Winston fait son entrée dans la cour du château de Montjoux pour se prêter au jeu de l’interview au micro de La Fabrik. L’occasion de nous présenter son nouvel album “Curio City” mais aussi de revenir sur sa vie d’avant et de laisser entrevoir de futurs projets prometteurs.

Six ans après votre 1er album « Hobo », vous revenez avec « Curio City », un 3ème album qui marque un tournant dans votre carrière musicale avec un univers plus électronique (notamment à travers le titre « Just Sayin’ »).  Qu’est-ce qui a marqué ce changement ? Y a-t-il eu un événement ou une rencontre particulier qui vous a fait réaliser que vous deviez changer de direction ?

Mon 1er album « Hobo » était une sélection des meilleurs morceaux que j’ai réalisés sur 10 ans avec des influences de la génération de mes parents. J’ai musicalement vécu dans les années 40 et 50. Sur le 2ème album « Running Still », les influences étaient celles de mon adolescence des années 80 et 90, avec le début du hip hop, du punk-rock et ce genre de choses. Sur cet album, j’ai réalisé que je n’avais pas beaucoup écouté de musique contemporaine. C’est facile de dire que la musique actuelle c’est de la merde, parce qu’on la compare à ce qui se faisait avant. C’est facile d’être snob par rapport à ce qui se fait aujourd’hui mais je n’ai pas envie de faire le snob donc j’ai commencé à écouter la musique du moment et je voulais que cet album sonne plus contemporain. C’est ce qui a surtout marqué ce tournant. Mais j’ai aussi connu le succès, acheté une maison, passé mon permis, acheté une voiture, créé une famille, etc… Donc quelque part cet album définit davantage ma propre vie. Ce n’est pas celle que j’ai appris de mes parents, ce n’est pas celle que j’ai appris à l’école ou de mes amis, tout ça c’est le passé. « Curio City » c’est vraiment à propos de moi et de la vie telle que je l’ai choisie aujourd’hui.

Dans une précédente interview, vous avez dit que vous vouliez faire le genre de musique qu’on peut entendre sur les radios anglaises. C’est surprenant car en général, les artistes essaient plutôt de se détacher du courant actuel…

Je ne veux pas essayer de faire du « mainstream », je cherche juste à retrouver là d’où je viens. Quand j’étais à Londres avant, j’étais beaucoup plus tourné vers l’extérieur : j’écoutais beaucoup de musique française ou de « world music » parce que j’étais un peu lassé de la musique qui se faisait en Angleterre. Quand j’ai renoué avec la musique anglaise actuelle, j’ai écouté des groupes grand public mais j’ai aussi écouté des groupes électro plus alternatifs : Nils Frahm, Caribou… Je cherche simplement à être influencé par quelque chose de nouveau. Et puis, je suis un compositeur et écrire des chansons signifie pour moi de communiquer un message aux gens et le « mainstream » peut faciliter les choses. Il y a des groupes « mainstream » de merde et des bons groupes « mainstream ». De la même manière qu’il y a des groupes avant-gardistes de merde et des bons groupes avant-gardistes, ce n’est pas parce qu’on est avant-gardiste qu’on fait nécessairement de la bonne musique. Pour moi, le medium n’est pas important mais c’est plutôt l’idée qui prime.

Qu’est-ce qui change par rapport aux radios françaises ?

Et bien il y a beaucoup plus d’électro. Et je trouve qu’il y a moins cet aspect « théâtral ». J’ai pris de gros risques de faire ce que j’ai fait parce que je pense que ce que le public français aimait beaucoup chez moi, c’était le personnage de Charlie Winston. Et je voulais justement me détacher de ce personnage, de moins me concentrer sur l’idée de créer une atmosphère mais prendre un peu de recul et laisser la musique prendre les devants, la laisser parler.

Est-ce également un moyen de renouer les liens avec votre pays d’origine, la Grande-Bretagne ?

Oui, assurément. La maison que j’ai achetée est à Londres donc je suis revenu en Angleterre. J’ai déménagé en France en 2009 quand j’ai enregistré « Hobo », j’y suis resté deux ans puis j’ai voyagé encore deux ans, en tournée. J’ai ressenti l’envie de retrouver ma place, de me sentir à nouveau chez moi. Londres a été la première étape, la deuxième a été la réalisation de ce nouvel album.

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